Mc 7 : Le Pain de la Parole

DIMANCHE 17 JUIN 2012

 

Le Semeur est sorti pour semer la Bonne Nouvelle. Heureux qui la reçoit et la fait fructifier (Antienne de l'Evangile de ce dimanche)

Nuit et jour, qu'il dorme ou qu'il se lève, la semence germe et grandit, il ne sait comment. D'elle-même, la terre produit d'abord l'herbe, puis l'épi, enfin du blé plein l'épi" (Mc 4 – Evangile de la messe de ce dimanche).

les petits chiens sous la table mangent les miettes des enfants (Mc 7,28)

 

Après le Dimanche du Saint-Sacrement, dimanche dernier, ce dimanche pourrait être celui de la Parole de Dieu. Les paraboles agricoles que Jésus utilise nous révèlent en effet ce cheminement de la Parole de la Bonne Nouvelle dans le coeur de celui qui la reçoit. La pédagogie de la lectio divina est au service de cette fécondité et de cette croissance de la Parole de Dieu dans les coeurs pour qu'elle porte du fruit.

Cela nous rappelle que la manière dont le Seigneur a prévu que sa Parole porte du fruit n'est pas de l'ordre de l'efficacité technique, mais bien de la fécondité. Aussi n'attendons pas avec inquiétude de voir immédiatement ce que la Parole de Dieu veut nous dire. Laissons, par notre fidélité et notre persévérance dans son accueil, le temps de la croissance mystérieuse et cachée. Ce qui nous appartient n'est pas de faire croître cette Parole, mais de tout mettre en oeuvre pour ne pas empêcher ce lent travail de la germination qui est l'oeuvre de l'Esprit-Saint. C'est pourquoi dans la tradition chrétienne, on recommande de lire au moins trois fois le même texte biblique pour que celui-ci porte du fruit.

 

La lectio divina quotidienne de cette semaine nous invite à suivre le Christ, hors de la terre d'Israël, à la rencontre des populations païennes pour leur révéler le mystère du Royaume et leur manifester sa puissance de salut. 

 

Aujourd'hui nous méditons sur la rencontre de Jésus avec une Syrophénicienne. La réponse de cette femme, pleine de foi, a longuement été méditée dans la tradition chrétienne. Le "pain des enfants" peut être compris comme le pain de la Parole dont nous pouvons manger au moins quelques miettes. 

 

Nous vous proposons quelques méditations sur ce thème : 

 

Guillaume de Saint-Thierry (oraisons méditatives) : 

Parfois, Seigneur, je te sens passer, tu ne t'arrêtes pas pour moi, tu me dépasses, mais je crie vers toi comme la Cananéenne. Vais-je donc encore oser m'approcher de toi ? Bien sûr, car les petits chiens chassés de la maison de leur maître ne laissent pas de revenir, et veillant à la garde de la maison, ils reçoivent leur pain chaque jour. Chassé, me voilà donc encore ; mis à la porte, je crie ; malmené, je supplie. Comme les petits chiens ne peuvent pas vivre loin des hommes, pas davantage mon âme loin de mon Dieu ! Ouvre-moi, Seigneur. Que j'arrive jusqu'à toi pour être inondé de ta lumière. Toi, tu habites dans les cieux, tu t'es caché dans les ténèbres, dans la nuée obscure. Tes étoiles ne luisent plus pour moi, le soleil s'est obscurci, la lune ne donne plus sa lumière. J'entends bien chanter tes hauts faits dans les psaumes, les hymnes et les cantiques spirituels ; dans l'Evangile tes paroles et tes gestes resplendissent de lumière ; les exemples de tes serviteurs, les menaces et les promesses de tes Ecritures de vérité s'imposent à mes yeux et viennent frapper à la surdité de mes oreilles. Mais mon esprit s'est endurci ; j'ai appris à dormir face à la splendeur du soleil ; je me suis accoutumé à ne plus voir ce qui s'offre à moi ainsi. Jusques à quand, Seigneur, jusques à quand tarderas-tu à déchirer tes cieux, à descendre pour venir secouer ma torpeur ? (Ps 12,1;Is 64,1) Que je me convertisse et que je revienne au moins vers le soir, comme un petit chien affamé. 

 

Jean Chrysostome (Homélies sur Mt) :
 
Que fait la Cananéenne après avoir entendu ces paroles ? Est-ce qu'elle s'en va en gardant le silence ? Perd-elle courage ? Pas du tout ! Elle insiste davantage. Ce n'est pas ce que nous faisons : quand nous ne sommes pas exaucés, nous nous retirons découragés, alors qu'il faudrait insister avec plus d'ardeur. Qui donc, il est vrai, n'aurait pas été découragé par la réponse de Jésus ? Son silence aurait suffi à ôter tout espoir. Mais cette femme ne perd pas courage, au contraire elle s'approche de plus près et se prosterne en disant : « Seigneur, viens à mon aide (v. 25). Si je suis un petit chien dans cette maison, alors je ne suis plus une étrangère. Je sais bien que la nourriture est nécessaire aux enfants, mais il ne faut pas interdire de donner les miettes. On ne doit pas me les refuser, parce que je suis le petit chien qu'on ne peut pas repousser ». C'est parce qu'il prévoyait sa réponse que le Christ tardait à exaucer sa prière. Ses réponses n'étaient pas destinées à faire de la peine à cette femme, mais à révéler ce trésor caché.
 
Homélie grecque du IVe siècle : 
 
« Il a renversé les puissants de leur trône et a élevé les humbles ». Les humbles, les peuples païens, qui étaient affamés de justice, ont été exaltés. En faisant paraître leur humilité et leur faim de Dieu, et en sollicitant la parole de Dieu comme la Cananéenne demande les miettes, ils ont été rassasiés des richesses que recèlent les mystères divins..

 


 

 

Aujourd'hui, nous commençons la deuxième étape de notre parcours de lectio divina dans l'Evangile selon saint Marc. Désormais, pour chaque journée, le texte biblique est accompagné soit par un autre texte de l'Ecriture (pour déployer la "symphonie de la Parole de Dieu"), soit par un commentaire de la Tradition chrétienne (pour appuyer notre propre méditation sur celle des différentes générations de chrétiens qui ont prié ces textes).

Dans cette étape de notre parcours tout est fait pour accompagner la méditation de la Parole de Dieu. Nous vous proposons quelques remarques sur cet 'échelon' de la pédagogie de la lectio divina : 

 

1 – Cette méditation peut s'appuyer soit sur ce que vous aviez découvert, il y a quelques jours, lors de la première lecture de ce passage biblique (et qui aura peut-être été noté), soit sur ce qui a retenu votre attention en relisant pour la deuxième ou la troisième fois le même texte. La méditation trouve en effet sa source dans cette lecture attentive de la Parole de Dieu qui constitue le premier 'échelon' de la pédagogie de la lectio divina. 

 

2. Cette méditation peut se développer en deux temps :

  • – Tout d'abord, méditer sur ce que Dieu révèle de lui-même dans ce texte. Si le texte biblique est une Parole de Dieu, cela signifie que Dieu livre son coeur dans cette parole offerte. Il nous dit qui il est, comment il se rend présent, comment il agit au bénéfice des hommes, quelle est la qualité de relation qu'il veut entretenir avec son peuple... A ce point de la méditation, nous pouvons alors voir comment ce qui est annoncé et révélé dans ces textes s'accomplit dans la personne de Jésus Christ, Parole du Père en plénitude, et dans son oeuvre de salut. 
  • – Dans un second temps, la méditation nous permet de voir comment cette Parole de Dieu s'actualise dans la vie des croyants, dans notre existence. C'est-à-dire que nous pouvons nous demander comment cette Parole de Dieu produit du fruit en notre coeur, dans notre vie, dans nos choix, comment cette Parole nous fait progresser, encourage notre conversion.

 

3. Ensuite, appuyés sur les fruits de cette méditation, nous pourrons arriver à notre prière de réponse. Il s'agit de la troisième étape de la pédagogie de la Lectio Divina. Cette prière de réponse peut prendre la forme suivante : « Seigneur, toi qui as manifesté ta présence auprès de ton peuple éprouvé, apprends-moi à découvrir comment tu es présent également dans mon existence» ; ou encore : « Seigneur toi qui as révélé la merveille de ta victoire à tous ceux que tu as rencontrés, à ceux qui t'ont suivis, fais-nous la grâce de vivre également de ce salut et de participer à ta victoire ».

 

4. Enfin, le quatrième 'échelon', celui de la contemplation, peut alors découler de ces 'échelons' précédents que sont la méditation et la prière. Sous la lumière de l'Esprit Saint, nous pouvons alors goûter la présence du Seigneur auprès de nous, en nous, nous laisser toucher intérieurement par cette présence, pour en vivre et mettre en oeuvre cette Parole de Celui qui est présent "tous les jours jusqu'à la fin des temps". 

 

 

Sainte lectio divina

Christophe de DREUILLE