Ecouter le Christ, Parole du Père (Mt 17)

DIMANCHE 16 MARS 2014

 

"Celui-ci est mon Fils, bien-aimé, en qui j'ai mis tout mon amour; écoutez-le!"

"Relevez-vous et n'ayez pas peur!" (Mt 17)

 

Dans notre marche vers Pâques, l'événement de la Transfiguration du Christ est une étape décisive qui tout à la fois annonce la Passion et révèle la gloire de la Résurrection. Nous pouvons prendre du temps, durant la semaine qui s'ouvre par ce dimanche, pour méditer ce grand texte biblique qui rassemble autour de Jésus quelques-unes des grandes figures de l'AT comme du NT. Ils sont ensemble les témoins de la gloire de Dieu et la découvrent attachée à la personne du Christ, le Fils bien-aimé du Père.

 

Quelques réflexions pourront accompagner la méditation de ce texte de la Parole de Dieu : 

 

Une théophanie
 
L’antique prière de Moïse, « fais-moi de grâce voir ta gloire » avait à l’époque reçu cette réponse de Yahvé : « je ferai passer devant toi toute ma beauté et je prononcerai devant toi le nom de Yahvé… mais tu ne peux pas voir ma face, car l’homme ne peut me voir et vivre » (Ex 33,18-23). Ce que Moïse n’avait pu vivre que partiellement, les trois apôtres y sont ici introduits en plénitude. Ils contemplent Jésus dans sa gloire divine. L’humanité transfigurée du Christ, permet enfin à l’homme de contempler le visage resplendissant de Dieu. Moïse avait donc fait une expérience de la théophanie (la manifestation glorieuse de Dieu), sur le Sinaï ; des siècles plus tard, Elie, sur la même montagne avait fait une nouvelle expérience de la manifestation de Dieu. De Moïse, certains pensaient qu’il n’était pas mort, mais avait été emmené au ciel, tout comme Elie le prophète. Les textes bibliques annonçaient, pour l’accomplissement des temps, un Prophète semblable à Moïse (Dt 18,18) et le retour d’Elie (cf. le dernier des livres prophétiques, Ml 3,23). Ces quelques incursion dans l’Ancien Testament, dont étaient nourris les apôtres, suffisent à prendre conscience de l’importance inouïe de l’événement. Avec la présence de la nuée, et la voix de Dieu, tous les signes sont rassemblés pour faire de cette Transfiguration sur la montagne le plein accomplissement des promesses de l’Ancien Testament, et le moment indépassable au terme du temps et de l’histoire. La réaction de Pierre de ce point de vue est cohérente : « je vais faire trois tentes ».
Les apôtres, en contemplant la divinité de Jésus, habituellement voilée dans son humanité, ont fait une expérience du mystère trinitaire : Le Père dont ils entendent la voix, Jésus, le Fils bien-aimé, et la nuée qui exprime la présence de l’Esprit-Saint. La parole donnée éclaire le sens du récit ; la voix du Père, comme au baptême de Jésus, révèle les liens qui l’unissent à son Fils. Tout semble donc donné. L’Ancien Testament est accompli et l’identité de Jésus dévoilée. Et pourtant, il faudra « redescendre » de la montagne ; il y a bien un « après » la transfiguration. Quel sens peut-il donc bien avoir ?
 
Pourquoi redescendre ?
 
Le récit ne s’arrête pas sur la reconnaissance des liens qui unissent le Père et le Fils, mais la voix du Père contient un élément qui oriente de manière décisive la vraie compréhension de l’événement : « Bien-aimé ». Ce terme renvoie en effet au Sacrifice d’Abraham (Gn 22) et fait de la transfiguration une étape décisive dans l’annonce de la passion, de la mort, et aussi de la résurrection du Christ (v. 9). D’ailleurs Jésus se retrouve seul, et s’il faut redescendre, c’est que tout n’est pas encore pleinement accompli. C’est le moment de signaler que les trois apôtres présents sur la montagne seront ensuite les témoins de l’agonie de Jésus à Gethsémani, au début de sa passion. De multiples manières, le récit de la transfiguration oriente nos regards vers le mystère pascal du Christ. Ce n’est qu’alors que tout sera accompli, lorsque dans sa résurrection Jésus permettra à tous les hommes d’être glorifiés en lui, de la gloire dont les apôtres ont perçu un éclat sur la montagne. La liturgie chrétienne résume le sens de la transfiguration ainsi : Jésus a montré sa gloire aux témoins qu’il avait choisis, le jour où son corps semblable au nôtre fut revêtu d’une grande lumière ; il préparait ainsi le coeur de ses disciples à surmonter le scandale de la croix, il laissait transparaître en sa chair la clarté dont resplendira le corps de son Eglise (Préface de la messe de la Transfiguration). Fra Angelico représentera cette annonce de la Croix au cœur de la Transfiguration : le Christ sur la montagne étend les bras jusqu’à occuper au maximum l’espace de la fresque.
 
    
 
 
Sainte lectio divina en ce Temps du Carême
 
Christophe de DREUILLE
@lectiodivina13