Nous prions avec le livre du prophète Jérémie : 
 
du 18 au 24 mars : semaine 6 
 
du 25 au 31 mars : semaine 7
 
 
 
Durant l'Octave de Pâques, nous prions avec l'Evangile selon Saint Marc Paques 2018
 

 

MARDI 10 AVRIL – SEMAINE DE L'OCTAVE DE PÂQUES

 

Notre coeur n'était-il pas tout brûlant au-dedans de nous, quand il nous parlait en chemin, quand il nous expliquait les Ecritures (Lc 24,32).

 

 

Rencontre de Jésus avec les Disciples d’Emmaüs  (Lc 24, 13 – 35)

 

Une synthèse et une charnière

Rédigé avec un soin particulier, ce récit tire son importance de sa double fonction : il récapitule l’ensemble du parcours évangélique en soulignant l’accomplissement des Ecritures dans le mystère pascal du Christ ; il inaugure, avant même que cela ne soit développé dans les Actes des Apôtres, le « temps de l’Eglise ». Une question domine l’ensemble du récit : celle de la présence de Jésus après sa mort et de la qualité du regard qui permet aux disciples de la discerner. Le texte commence à jouer sur l’opposition absence / présence, pour orienter finalement le lecteur vers la forme de présence : visible / invisible. Luc rappelle aux croyants que la présence de Jésus à son Eglise est désormais invisible, mais reconnaissable par la méditation de l’Ecriture et la « fraction du pain », c’est-à-dire l’Eucharistie.

Lorsque Jésus est visible à leurs yeux de chair, les disciples le croient absent, mort. C’est lorsque Jésus disparaîtra à leurs regards, qu’ils le reconnaîtront présent.

En chemin

La construction narrative de ce texte place stratégiquement les lecteurs du côté de Jésus et les invite à scruter, tout au long de l’évolution du récit, à quel moment et de quelle manière les deux disciples parviendront à reconnaître celui qui marche à leur côté et se laisse inviter chez eux.

La rencontre se fait sur la route, et la reconnaissance, à la maison. Le chemin, thème cher à Luc, est le lieu privilégié de la conversion et du « cheminement » intérieur. Le dialogue qui s’instaure alors offre deux regards croisés sur la mission de Jésus. La conception que s’en font les disciples, est conforme à ce que connaît déjà le lecteur de l’Evangile, mais auquel il manque l’essentiel : le témoignage du Christ ressuscité. D’autre part, dans la bouche de Jésus, nous trouvons une relecture des Ecritures qui fournit le critère permettant de révéler la glorification du crucifié.

La reconnaissance

« A qui d’entre nous l’auberge d’Emmaüs n’est-elle pas familière ? ». François Mauriac comme Le Caravage ou Rembrandt ne s’y sont pas trompés qui ont mis en valeur le moment de la reconnaissance lors du don que Jésus fait à ses hôtes à la maison. La tristesse qui voilait le regard des disciples au début du récit se change alors en joie communicative. Le parcours à travers les Ecritures que Jésus avait proposé sur la route s’accomplit dans la « fraction du pain ». Le don usurpé par Adam et Eve (en Gn 3), devient le don de l’Eucharistie offert par Jésus à des disciples qui ne s’en emparent plus mais le reçoivent. Comme à l’origine de l’humanité, ici les yeux s’ouvrent, mais ce n’est plus sur le dénuement et la vanité, mais sur la plénitude d’une présence qui n’a plus besoin du support de la visibilité.

La reconnaissance

Saint Luc a écrit un texte, bâti sur le même schéma, dans les Actes des Apôtres : il s’agit de la rencontre du disciple Philippe avec le haut fonctionnaire éthiopien. Même rencontre sur la route, même importance donnée au témoignage des Ecritures (avec la citation du chant du Serviteur souffrant d’Isaïe), même catéchèse, même conclusion : le sacrement (eucharistie en Lc 24 et baptême en Ac 8). La grande différence entre les deux textes : en Lc 24, c’est Jésus qui conduit les disciples à la foi dans le Ressuscité présent ; dans les Actes, c’est désormais le disciple, le croyant, l’Eglise qui a cette mission d’annoncer la Bonne Nouvelle du Salut et de conduire à la Vie nouvelle dans le Christ ressuscité.

 

Commentaire de Benoît XVI (Verbum Domini, § 54-55)

Le récit de Luc sur les disciples d’Emmaüs nous permet de progresser dans la réflexion sur le lien entre la Parole et la fraction du pain (cf. Lc 24, 13-35). Jésus alla à leur rencontre le jour après le sabbat, écouta l’expression de leur espérance déçue, et, devenant leur compagnon de route, «il leur expliqua, dans toute l’Écriture, ce qui le concernait» (24, 27). Les deux disciples commencent à scruter d’une manière nouvelle les Écritures en présence de ce voyageur qui, de façon inattendue, se montre si proche de leur vie. Ce qui est arrivé en ces jours-là n’apparaît plus comme un échec, mais comme un accomplissement et un nouveau départ. Toutefois, ces paroles ne semblent pas encore satisfaire les disciples. L’Évangile de Luc nous dit que « leurs yeux s’ouvrirent, et ils le reconnurent » (24, 31), seulement quand Jésus prit le pain, dit la bénédiction, le rompit et le leur donna, alors qu’auparavant, «leurs yeux étaient aveuglés, et ils ne le reconnaissaient pas» (24, 16). La présence de Jésus, d’abord à travers ses paroles, puis avec le geste de la fraction du pain, a permis aux disciples de le reconnaître ; ils purent éprouver d’une manière nouvelle ce qu’ils avaient précédemment vécu avec lui: « Notre cœur n’était-il pas brûlant en nous, tandis qu’il nous parlait sur la route, et qu’il nous faisait comprendre les Écritures ? » (24, 32).

Ces récits montrent comment l’Écriture elle-même conduit à appréhender son lien indissoluble avec l’Eucharistie. « C’est pourquoi il faut toujours avoir présent à l’esprit que la Parole de Dieu, lue et annoncée par l’Église dans la liturgie, conduit au sacrifice de l’Alliance et au banquet de la grâce, c’est-à-dire à l’Eucharistie ».193 La Parole et l’Eucharistie sont corrélées intimement au point de ne pouvoir être comprises l’une sans l’autre: la Parole de Dieu se fait chair sacramentelle dans l’événement eucharistique. L’Eucharistie nous ouvre à l’intelligence de la Sainte Écriture, comme la Sainte Écriture illumine et explique à son tour le Mystère eucharistique. En effet, sans la reconnaissance de la présence réelle du Seigneur dans l’Eucharistie, l’intelligence de l’Écriture demeure incomplète. C’est pourquoi, « la Parole de Dieu et le Mystère eucharistique ont toujours et partout reçu de l’Église non pas le même culte mais la même vénération. C’est ce qu’elle a établi, poussée par l’exemple de son Fondateur, en ne cessant jamais de célébrer son Mystère pascal, en se réunissant pour “lire dans toute l’Écriture, ce qui le concernait” (Lc 24, 27), et pour réaliser l’œuvre du salut par le mémorial du Seigneur et les Sacrements ».

 

 

Sainte lectio divina en ces jours de Pâques.

 

Christophe de DREUILLE