MARDI 4 JUIN 2013

 

Dieu n'a pas épargné son propre Fils mais l'a livré pour nous tous, comment avec lui ne nous accordera-t-il pas toute faveur ? (Rm 8,32)

 

Nous vous proposons quelques textes pour accompagner la méditation de ces jours, dans ce grand chapitre 8 de l'Epître aux Romains. Nous pourrons alors dans la prière nous acheminer vers l'action de grâce, la contemplation, et la mise en oeuvre de la Parole dans nos vies : 

 

Jean Chrysostome – Homélie sur l'Epître aux Romains :

 

Le Père n'a pas épargné son propre Fils (Rm 8,32) ; toi, tu ne donnes même pas un morceau de pain à celui qui a été livré et immolé pour toi. Le Père, pour toi, ne l'a pas épargné ; toi tu passes, méprisant, à côté du Christ qui a faim, alors que tu ne vis que de ses bienfaits… Il a été livré pour toi, immolé pour toi, il vit dans le besoin pour toi, il veut que la générosité te soit avantageuse et, même ainsi, tu ne donnes pas. Y a t-il des pierres aussi dures que vos coeurs alors que tant de raisons les interpellent ? Il n'a pas suffi au Christ d'endurer la mort et la croix ; il a voulu devenir pauvre, mendiant et nu, être jeté en prison (Mt 25,36) afin que cela au moins te touche. « Si tu ne me rends rien pour mes douleurs, dit-il, aie pitié de moi à cause de ma pauvreté. Si tu ne veux pas me prendre en pitié pour ma pauvreté, que mes maladies te fléchissent, que mes chaînes t'attendrissent. Si tout cela ne te touche pas, consens du moins à cause de la petitesse de la demande. Je ne te demande rien de coûteux, mais du pain, un toit et des paroles d'amitié. J'ai été enchaîné pour toi et je le suis encore pour toi, afin qu'ému par mes liens passés ou par ceux d'aujourd'hui, tu veuilles bien m'être miséricordieux. J'ai souffert la faim pour toi, et je la souffre encore pour toi. J'ai eu soif lorsque j'étais pendu à la croix et j'ai encore soif par les pauvres afin de t'attirer par cela vers moi et de te rendre bon pour ton salut ». Il dit en effet : « Quiconque reçoit ces petits, me reçoit (Mc 9,37). Je pourrais te couronner sans cela, mais je veux devenir ton débiteur afin que tu portes la couronne avec assurance. C'est pourquoi, alors que je pourrais me nourrir moi-même, je vais mendiant çà et là, je me tiens debout à ta porte et je tends la main. C'est par toi que je veux être nourri, car je t'aime ardemment. Mon bonheur c'est d'être à ta table. » 
 

Jean-Paul II – Homélie :

Dieu, "n'a pas épargné son propre Fils mais l'a livré pour nous tous, comment avec lui ne nous accordera-t-il pas toute sa faveur?" (Rm 8, 32). C'est l'Apôtre Paul, dans l'Epître aux Romains, qui pose cette question, de laquelle ressort avec clarté le thème central de la liturgie d'aujourd'hui:  le mystère de la paternité de Dieu. Ensuite, dans le passage évangélique, c'est le Père éternel lui-même qui se présente à nous lorsque, du nuage lumineux qui entoure Jésus et les Apôtres sur le Mont de la Transfiguration, il fait entendre sa voix en admonition:  "Celui-ci est mon Fils bien-aimé, écoutez-le!" (Mc 9, 7). Pierre, Jacques et Jean ont l'intuition - ils comprendront mieux par la suite - que Dieu leur a parlé en se révélant lui-même, ainsi que le mystère de sa réalité la plus intime. Après la résurrection, ils apporteront dans le monde avec les autres Apôtres l'annonce bouleversante:  dans son Fils qui s'est incarné, Dieu s'est fait proche de chaque homme comme Père miséricordieux. En Lui, chaque être humain est enveloppé par l'étreinte tendre et forte d'un Père.

Dieu le Père "n'a pas épargné son propre Fils mais l'a livré pour nous tous" (Rm 8, 32). Abraham, en acceptant d'immoler Isaac, préannonce le sacrifice du Christ pour le salut du monde. L'exécution effective du sacrifice, qui fut épargnée à Abraham, aura lieu avec Jésus-Christ. C'est lui-même qui en informe les Apôtres:  en descendant du mont de la Transfiguration, Il leur ordonne de ne pas raconter ce qu'ils ont vu, avant que le Fils de l'homme ne soit ressuscité d'entre les morts. L'évangéliste ajoute:  "Ils gardèrent la recommandation, tout en se demandant entre eux ce que signifiait "ressusciter d'entre les morts"" (Mc 9, 10). Les disciples ont eu l'intuition que Jésus est le Messie et qu'en Lui s'accomplit le salut. Mais ils ne réussissent pas à comprendre pourquoi il parle de passion et de mort:  ils n'acceptent pas que l'amour de Dieu puisse se cacher derrière la Croix. Et pourtant, là où les hommes verront seulement une mort, Dieu manifestera sa gloire en ressuscitant son Fils; là où les hommes prononceront des paroles de condamnation, Dieu accomplira son mystère de salut et d'amour envers le genre humain. Telle est la leçon que chaque génération chrétienne doit recommencer à apprendre. Chaque génération:  la nôtre également! C'est là que se trouve la raison de notre chemin de conversion en ce temps singulier de grâce. Le Jubilé illumine toute la vie et l'expérience des hommes. Même la difficulté et la lourdeur du travail quotidien reçoivent dans la foi dans le Christ mort et ressuscité une nouvelle lumière d'espérance. Elles se révèlent comme des éléments significatifs du dessein de salut que le Père céleste est en train d'accomplir à travers la Croix du Fils.

 

Salvien de Marseille – Du gouvernement de Dieu :

L'amour de Dieu pour nous est bien plus grand celui d'un père. C'est ce que prouvent ces paroles du Sauveur dans l'Évangile : « Dieu a tellement aimé le monde qu'il a donné son Fils unique pour la vie du monde » (Jn 3,16). Et l'apôtre Paul dit aussi : « Dieu n'a pas épargné son Fils, mais l'a livré pour nous tous. Comment ne nous a-t-il pas donné, avec lui, toutes choses ? » (Rm 8,32) C'est pourquoi Dieu nous aime plus qu'un père n'aime son fils. C'est une chose évidente que Dieu nous chérit au-delà de l'affection paternelle, lui qui, pour nous, n'a pas épargné son Fils –- et quel Fils ! Ce Fils juste, ce Fils unique, ce Fils qui est Dieu. Peut-on dire davantage ? Oui ! C'est pour nous, c'est-à-dire pour des méchants, pour des coupables, qu'il ne l'a pas épargné. C'est pourquoi l'apôtre Paul, pour nous signifier, dans une certaine mesure, l'immensité de la miséricorde de Dieu, s'exprime ainsi : « Alors que nous n'étions encore capables de rien, le Christ, au temps fixé par Dieu, est mort pour les coupables -- à peine accepterions-nous de mourir pour un homme juste » (Rm 5,6-7). A coup sûr, par ce seul passage il nous montre l'amour de Dieu. Car si c'est à peine que l'on mourrait pour quelqu'un de très juste, le Christ nous a prouvé comme il était meilleur, en mourant pour les coupables que nous sommes. Mais pourquoi le Seigneur a-t-il agi ainsi ? L'apôtre Paul nous l'enseigne aussitôt par ce qui suit : « Dieu nous prouve son amour à notre égard : car si le Christ est mort pour nous quand nous étions pécheurs, combien plus maintenant, justifiés dans son sang, serons-nous sauvés par lui de la colère ? » (v. 8-9). La preuve qu'il en donne, c'est qu'il est mort pour les coupables : un bienfait a plus de prix quand on l'accorde à des indignes... Car s'il l'avait accordé à des saints et à des hommes de mérite, il n'aurait pas montré qu'il est celui qui donne ce qu'on ne devrait pas donner, mais il se serait montré comme celui qui ne fait que rendre ce qui est dû. Que lui rendrons-nous donc pour tout cela ?

 

Sainte lectio divina
Christophe de DREUILLE
@lectiodivina13